Libérez Ségolène !

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Par Nicolas Domenach, directeur adjoint de la rédaction de Marianne.
Dans la dernière ligne droite, Ségolène Royal a annoncé sa volonté de « reprendre sa liberté ». Sans doute pour mieux illustrer sa détermination, elle arborait, sur France 2, une nouvelle coiffure moins permanentée, signe indubitable de sa volonté d'émancipation !

Pourtant, cela fait moins de quinze jours qu'elle a elle-même rappelé les éléphants. Alors, la candidate socialiste patauge-t-elle en pleine contradiction, ou a-t-elle pris conscience enfin de ce que l'élection présidentielle n'est pas un scrutin législatif où la force partisane se révèle déterminante ? Dans une compétition élyséenne compte d'abord le lien direct, qui se noue ou pas, entre le peuple et le candidat. La gauche a toujours eu du mal avec cette conception monarchique des institutions. Seul Mitterrand est parvenu à s'y glisser avec bonheur ; il est vrai qu'il venait de la droite et que son caractère autocrate l'y poussait.

Ségolène Royal, elle aussi, ne manque pas de caractère. Si elle a dû se réfréner ces dernières semaines, et même céder à ces apparatchiks, dont son compagnon, qui
voulaient toujours plus l'entourer et la cadrer, deux événements l'ont poussée à vouloir se dégager de leur haute pression pour respirer et s'imposer davantage. D'abord il y a eu le succès de la campagne de François Bayrou qui, lui, a la chance de ne pas être encombré de pachydermes, et donne le sentiment dans tous ses déplacements de prendre son temps pour approfondir un dialogue singulier avec les Français.

Bayrou est dans un corps à cœur avec le peuple qu'elle avait donné l'impression de rechercher dans sa séquence de démocratie participative. Mais le soutien encombrant du P.S. est venu parasiter cette relation. En particulier les interventions intempestives de son compagnon et premier secrétaire, François Hollande. Ses déclarations répétées sur les riches, non seulement ont effarouché les couches moyennes, persuadées que le PS allait les tondre, mais surtout donné l'impression que c'est le parti qui cadrait et dirigeait la candidate. Ce trouble apparaît dans toutes les enquêtes qualitatives, où les personnes interrogées se demandent qui est le patron, et donc qui sera le Président : Ségolène Royal ou François Hollande que, dans l'entourage même de la candidate, on n'appelle plus que « le Surgé ».

Il faut donc que Ségolène Royal se libère de lui aussi, de lui en premier. Les Français d'abord, et ensuite François! Il faut qu'elle fasse comprendre aux Français que c'est elle qui commande. Elle a commencé hier en déclarant, au risque de braquer le parti, que sa victoire ne serait pas celle du PS, qu'il n'y aurait pas de revanche de la gauche contre la droite. C'est déjà ça.

Il va falloir qu'elle se libère encore davantage la tête de ces exigences que lui tambourinent sans cesse les apparatchiks. Ceux-ci lui rappellent en effet en permanence les impératifs du parti et de la gauche, alors qu'elle veut penser plus large, qu'elle entend parler à la France. De toute façon, ces mêmes apparatchiks sont beaucoup plus préoccupés par leurs intérêts personnels et par le prochain congrès que par le succès d'une candidate à laquelle ils ne croient guère. Socialistes orthodoxes et sociaux-démocrates ont d'ailleurs commencé à se déchirer publiquement sur l'ouverture au centre, sans se soucier un instant de ses intérêts. Elle est donc condamnée à défendre toute seule sa cause, à reprendre en main sa campagne et son agenda. « Il faut, disent ses proches, qu'elle retrouve le temps de flâner, de toucher, de parler, qu'elle ne se laisse plus balader ni cadenasser par des impératifs extérieurs ».

Ségolène Royal serait performante, en effet, quand elle est elle-même, quand elle suit ses intuitions. Le problème, c'est qu'elle est devenue une Marianne de timbre-poste que le PS a collé sur ses enveloppes. Et comme c'est sa première candidature, elle s'est faite promener, a voulu en faire toujours plus, alors qu'il faut faire toujours mieux. Désormais, elle va cornaquer ces éléphants qui jubilent trop à écraser ainsi la petite souris. Ce qui remettrait les choses dans un ordre plus juste. Enfin…
 

Vendredi 16 Mars 2007
Nicolas Domenach
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S
ENFIN !!!! Il n'est pas trop tard pour se déclarer la patronne !
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