UN PROCUREUR CONVOQUE AU MINISTERE

Publié le par webmaster

"Une convocation effectuée en toute violation de la loi"


NOUVELOBS.COM | 30.08.2007 | 18:19

 Philippe Nativel, vice-procureur de Nancy, a été convoqué par la Chancellerie afin de s'expliquer sur ses propos critiques sur les peines planchers, qu'il aurait tenus lors d'une réquisition. Quelle est votre réaction ?

- C'est une atteinte grave et inadmissible à l'indépendance de la justice. Et je dirais même une situation totalement inédite dans l'histoire de la Chancellerie. En effet, pour la première fois, un Garde des Sceaux convoque un magistrat afin que celui-ci s'explique sur des propos tenus dans le cadre d'une réquisition, autrement dit dans l'exercice de sa profession. Ce qui constitue une violation flagrante de l'article 33 du Code de procédure pénale, qui consacre le principe de liberté de parole à l'audience du ministère public. Je crois même que c'est la première fois depuis le Code Napoléon qu'une telle chose se produit.
Je le répète, la convocation a été effectuée en toute violation de la loi. En d'autres termes, c'est un empiètement grave du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire.
Nous comptons bien entendu réagir à cette remise en cause des magistrats. Dans un courrier adressé au Garde des Sceaux et qui partira ce soir, nous faisons part de notre indignation quant à cette convocation à Madame Dati, et demandons un rendez-vous en urgence pour évoquer cette affaire.
De plus, nous y avons joint notre réaction vis-à-vis de l'attitude de la députée UMP de Nancy, Madame Nadine Morano, qui a diffusé des fausses informations sur notre collègue. Information à l'origine de cette déplorable affaire.
Par ailleurs, nous convoquons officiellement ce soir le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) afin qu'il statue sur la violation de la ministre. Cela fait partie de ses attributions, dans la mesure où, aux termes de l'article 64 de la Constitution, le CSM assiste le Président de la République dans sa fonction de garant de l'indépendance du pouvoir judiciaire.

Pourquoi l'USM compte-elle par ailleurs boycotter le voyage de Rachida Dati aux Pays-Bas, visite consacrée à la prise en charge des délinquants sexuels ?


- La question n'est pas de boycotter ou non. La position de l'USM sur le traitement de la délinquance sexuelle est connue, nous n'avons pas manqué de la faire connaître après l'annonce des mesures prévues par le gouvernement sur ce sujet, la semaine dernière.
Nous considérons que les issues existent, que tout le monde les connaît, et par conséquent, nous ne voyons pas l'intérêt de participer à un voyage médiatique.
Car les problématiques du traitement de la pédophilie sont connues : le manque de moyens des tribunaux, l'insuffisance criante du budget de la Justice, l'inapplication des textes existants...
Donc, il nous paraît complètement inutile de partir aux Pays-Bas pour trouver des solutions, puisqu'on sait déjà parfaitement ce dont il retourne.

La démission de Michel Marquer porte à cinq le nombre de départs du cabinet de la Garde des Sceaux en deux mois. Des rumeurs font état de "vives tensions" et taxent Rachida Dati d'"autoritarisme". Qu'en pensez-vous ?

- S'agissant de ces rumeurs, par définition, je ne sais pas ce qu'il en est au sein du cabinet de la ministre.
Mais je vais faire un constat objectif : il s'agit d'une situation inédite, c'est la première fois qu'une telle chose se produit dans le cabinet d'un Garde des Sceaux. Et c'est le seul cabinet ministériel de ce gouvernement qui subit une telle hémorragie.
Maintenant, cela ne nous intéresse pas vraiment. Sauf bien sûr que ce manque de continuité des collaborateurs dans son cabinet ne peut que porter préjudice à la politique pénale, judiciaire, au traitement des difficultés de la Justice, de la ministre.
Comme vous pouvez le constater, la réaction de l'USM est purement technique, puisque sur les motifs de ces départs, nous n'en savons rien et cela ne nous regarde en rien.

Propos recueillis par William Moray
(le jeudi 30 août 2007)

 Précision : Le Procureur a confirmé lors d'une interview à la Radio qu'il soutenait son collègue et qu'il était anormal que le judiciaire se laisse imposer sa conduite par  le pouvoir politique. séparation des pouvoirs. 

Quant aux départs successifs du cabinet de la Ministre on peut commencer à se poser des questions.

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article